Je place ça ici car le jeu était crowdfundé au départ, mais ça localisation française ne l’était pas.
Alice is missing n’a pas remporté d’AS d’or, mais on y a joué quand même.
Pour les béotiennes et les béotiens, Alice is missing est une sorte de jeu de rôle sans MJ (mais avec une modératrice qui a lu les règles dans le détail et les explique aux autres joueurs), qui se joue sur tel sans parler pendant une heure et demie. Le thème est assez poignant : notre amie (ou sœur, ou petite amie, ou ex) Alice, lycéenne de la Californie du nord a disparu, on ne sait comment ni pourquoi. On va chercher à découvrir ce qui a pu lui arriver. Le thème est sensible et surfe sur feue la hype de 13 raisons qui ont fait que…. Du coup le jeu est plein de prudence bienveillante, de la neutralité de genre à la X card.
On y a joué à cinq joueurs : ma chérie, mes petits (13, 14 et 15 ans, presque 16). Oui je sais, le jeu est +16 et puis on n’avait écarté aucune fin possible, y compris la plus tragique (en gros Alice peut être retrouvée saine et sauve, agressée, voire morte). Mais bon…
Franchement, on a bien aimé et tout le monde a bien dormi le soir. La mise en place, l’explication, la création des persos, l’enregistrement des messages (il faut que chacun laisse un message à Alice qu’on écoute tous à la fin de la partie) nous a pris une bonne heure (plus que les 45mn annoncées), mais ça allait.
Ensuite, le temps était mesuré à partir d’une image musicale – on peut difficilement appeler ça une vidéo, même si c’est sur YT – qui présentait un compte à rebours de 90mn. Donc ne pouvait guère dépasser le temps imparti (sauf à mettre sur pause). Toutes les 10, puis 5 mn, un joueur découvrait une carte événement qui lui donnait une piste pour relancer la conversation et faire avancer l’enquête, ou semer le trouble.
Le jeu a très vite et bien démarré, les petits sont entrés très facilement dedans. Un peu trop facilement, même ! Les messages (on avait créé un groupe WhatsApp et pas un groupe sms, mais ça ne change rien) s’enchaînaient si vite qu’on avait du mal à suivre ou à répondre à chaque fois. → On passera sur l’orthographe que ce type de phénomène génère à certains moments ; parfois je ne comprenais même pas les messages – ce qui me permettait de répondre d’un énigmatique « WTF ?? ».
Je jouais Charlie Brown, le modo (j’étais un garçon pour cette partie). J’ai fait attention à orienter la conversation sur le thème du jeu au début, histoire d’éviter les salves de « Wesh les gros ça va ou quoi ? » qui risquaient de polluer le fil, et tout ‘est bien passé.
J’ai essayé de dédramatiser les choses quand j’ai senti un peu de tension monter ; franchement ce n’était pas trop difficile.
Spoiler alarm
Par exemple, il fallait que je dise à Julia, la petite amie secrète d’Alice jouée par mon petit dernier pourquoi si Alice lui avait pardonné, moi je lui en voulais toujours. La conversation était en train de dériver sur une possible anorexie d’Alice qui ne mangeait plus rien ces derniers temps. L’ambiance devenait -pardon pour l’expression- un peu pesante. J’en ai profité pour régler mes comptes avec Julia en lui disant que je ne lui avais jamais pardonné qu’elle dise à Alice qu’elle avait un gros boule, parce que ça l’avait détruite et que c’était peut-être l’origine de ses troubles alimentaires. La façon dont j’ai tourné la phrase a remis tout le monde de bonne humeur.
Vers 70mn de jeu, le fil s’est un peu distendu, les événements se sont faits plus rares – et puis on était déjà partis dans toutes les directions ou presque
de l’agression par prof ou un marginal au fait qu’Alice fumait peut-être des puffs en cachette
, ce qui fait que la conversation a eu tendance à dériver en citations cachées qui valaient blagues : évidemment cela a dédramatisé le contenu du jeu.
Tout ça pour dire qu’après de périlleux rebondissements…
Exemple sous forme de spoil
Par exemple, Jack, le frère aîné d’Alice s’est fait enlever et a survécu deux fois à une agression sauvage en jetant une pièce qu’il m’avait discrètement demandée pour jouer à pile ou face. Après son double salut, il a reposé la pièce près de moi ; j’ai cru que c’était un événement de la partie et ai dit au groupe que j’avais trouvé une pièce, ce qui a fait conclure les copains qu’il fallait que je la garde parce que c’était le début de la fortune, ce à quoi j’ai répondu d’un « You bet, motherfuckers » qui a achevé me semer l’hilarité alors qu’Alice était toujours séquestrée dans le Sous-sol de Ryan et que la police n’arrivait pas.
nous avons retrouvé Alice.
Morte, mais comme nous étions en train de rire en citant la police en forme de Farès de Rabbi Jacob (« surtout ne bougez pas, nous arrivons »), Jack, qui a retrouvé son corps, n’a même pas lu la carte correctement et nous l’a déclarée (pourquoi donc ??) « droguée, mais vivante ».
Tout le monde a aimé la partie, et nous avons bien ri. Il y a même moyen de mobiliser des ressorts astucieux.
Exemple en forme de spoil
Julia (mon dernier, donc) devait dissuader Dakota (ma fille) de dévoiler son secret (qu’elle -Julia mon petit dernier- avait une liaison secrète avec Alice. Le petit dernier, sentant que Dakota allait tout balancer, l’a bloquée en dégainant la carte X. - Usage abusif s’il en est, mais finalement plutôt judicieux en l’occurrence.
Tout ceci s’est fait sous le contrôle du modo, via des messages persos (« Faut-il que je dise le secret de Julia ? » adressé à Charlie / « Puis-je utiliser la carte X en privé pour que quelqu’un ne parle pas de quelque chose ? » adressé à moi-même en tant que modo, via l’usage des parenthèses dans le message).
Je ne suis pas sûr qu’une deuxième partie s’impose, mais cela ne semble pas impossible à rejouer. Le temps nous le dira.
Après, je ne jouerais tout de même pas avec des gens vraiment sensibles, ou dont je ne serais pas capable de bien mesurer les réactions. Il y a certainement moyen de heurter durement des sensibilités et, évidemment, personne ne souhaite cela quand le but est de passer un bon moment.