La semaine dernière j’ai joué à …
Non non, pas si vite. Les choses ne se passent pas toujours du tac au tac, comme ça, naturellement. Parfois, quelque chose d’inattendu se produit.
La semaine dernière, donc. Je me gare. J’empoigne mon sac. Il pèse. Il pèse toujours.
Je rentre sans sonner. A quoi bon ? J’amène le jeu. Je suis attendu, forcément.
Les salutations fusent. Je ne dis rien, le regard fixe. Je pose le sac à côté de la table. Je maugrée quelque chose d’incompréhensible.
Pour dissiper la surprise et le malaise qui montent chez mes compères, le maître des lieux lâche un « alors, qu’est ce que tu nous amènes ? » enjoué.
« C’est Shackleton Base ? » tente l’un.
« Si c’est S.E.T.I, j’espère que t’as bossé les règles cette fois-ci, haha » plaisante l’autre.
Je ne réponds pas. Je ne parle pas. Je n’y arrive tout simplement pas. Le malaise s’épaissit.
« Ha si, je sais, c’est le gros truc de Feld, t’avais pas dit que t’allais le prendre ? Machin-lution là ».
J’ouvre le sac, et je dégaine THUNDERROAD VENDETTA d’un geste crispé.
Silence. Sidération.
« Ce soir on ne réfléchit pas. Ce soir on joue. » Je suis soulagé, et en même temps, j’ai peur. Je me tourne vers la chaîne. Je lance Fuel. La BO parfaite d’une soirée qui fera beaucoup de victimes, et très peu de vainqueurs.
GIVE ME FUEL, GIVE ME FIRE, GIVE ME THAT WHICH I DESIRE OOOH
Ligne de départ. Début du tour 2. Déjà 2 véhicules calcinés.
Merde quoi, c’est samedi soir, pour une fois, pour une fois, je veux faire quelque chose de simple. De furieux et de rapide. Et je pense avoir misé sur le bon cheval pour ça.
Quand on aime Mad Max et le post-apo en général, qu’on est sensible aux bonnes oeuvres de Restoration Games et qu’on ne crache pas sur la DA nerveuse et vintage de Marie Bergeron, THUNDERROAD VENDETTA coche beaucoup de cases. Mais passer à l’acte d’achat, pour un indécrottable kubenboiste comme bibi, ça n’a rien d’évident.
Déjà parce qu’il est cher putain. 200 boules en VO avec même pas toutes les extensions (je n’ai pas pris Big Rig and the Final Five) : je prends un très gros risque si le jeu s’avère n’être rien d’autre que les petits chevaux avec des bagnoles et de la nitro.
Ce n’est pas le cas. Bénis soient les dieux de l’asphalte, dans toute leur gloire chromée !
THUNDERROAD VENDETTA est une incroyable machine à puteries et à plans foireux, truffée d’échecs glorieux et de victoires sans éclat.
Ballec de l’asphalte ! Je traverse la boue. Je traverse le feu. Et je-me-tape-la-rampe !!!
J’aime beaucoup son gameplay … à base de dés. C’était pas gagné. Mais honnêtement, même si c’est parfois bêtement random, ça marche.
Vous avez 3 véhicules et 4 dés. Chacun son tour, on affecte un dé à un de ses véhicules, et on avance d’autant d’emplacements que sa valeur. Que faire ?
Tout miser sur un véhicule, quitte à se mettre une grosse cible sur le capot ? Faire du hors-piste ? Rester dans le troupeau, sans trop se mettre en avant (autrement appelé syndrome Root, ou la peur de l’effet "bash-the-leader") ? Ou rentrer dans les autres, pour provoquer un chaos indicible dont personne ne peut augurer du résultat ?
Réfléchissez pas trop : vous serez mort (de rire) dans les 3-4 premiers tours de toute façon. Et c’est pas grave, tant que c’est fait avec panache.
Ha non.
3 véhicules, 4 dés vous disais-je. Le 4ème sert à activer une capa : réparation, nitro, invocation d’hélicoptère pour les classiques, ou quelques autres plus exotiques si vous jouez avec les leaders de l’extension (indispensable) Choppe Shoppe.
L’hélico ? Oui, c’est une façon simple et élégante de calmer le mec qui ne fait que des 6 et qui disparait à l’horizon : on le fait poper juste devant l’indélicat, un coup de canon de 20mm dans la ganache, et voilà tous ses poursuivants relancés dans la course !
Mais ça reste du domaine de l’exceptionnel. Le plus souvent, vous rentrerez dans les copains. Juste pour le plaisir. Même en sachant qu’en jetant votre frêle buggy sur le van survitaminé du voisin, les dés seront contre vous. Si ça passe, et que ledit van se mange une falaise, roule sur une mine, traverse un océan de bitume enflammé, dérape sur une flaque d’huile et s’encastre sur un 3ème larron qui passait un peu plus loin … vous aurez gagné votre soirée.
Tout THUNDERROAD VENDETTA résumé en une image. Gagner, c’est bien, mais ce n’est pas le plus important. Gagner avec sa dernière bagnole en feu, en franchissant la ligne d’arrivée à fond de 6 en décollant d’une rampe - et voir le respect dans le yeux de vos adversaires - c’est gagner pour toujours. C’est être une légende. Un immortel Dieu de la route.
On a fait deux parties sur 3 heures de temps, à 4. Je pensais que ça se jouerait plus vite, mais c’était très bien comme ça. On s’est fendu la gueule, on s’est invectivé, on s’est félicité, gagnant comme perdants !
Au début tout le monde essayait de bien jouer, de préserver ses véhicules, de maximiser ses chances. A la deuxième, tout le monde tentait des trucs : moves audacieux, rampes, collisions, enchaînements craqués, etc…
Pour la victoire, parfois. Avec panache, toujours.
AND ON I BURN
CHURNING MY DIRECTION
QUENCH MY THIRST WITH GASOLINE