Justement toutes ces questions environnementales ont été abordées sous un oeil assez différent et surtout bien réprimées (j’en veux pour preuve la mémoire de ces luttes souvent passée sous silence) ce qui rendait moins anxiogène ces questions à l’échelle des nouvelles générations. Surtout après le tournant début des années 70.
C’est en partie cela. Même si jusque dans les années 70 les « 30 Glorieuses » font encore illusion. Et certains continuaient de trouver du boulot sans soucis même dans les années 80 tout en gardant les acquis sociaux post-WW2.
Mais là où je te suis c’est que derrière la réalité des boomers, on a beaucoup moins de gens que ce que l’expression « (ok) boomer ! » voudrait recouper (tant elle est galvaudée)
Tu crois vraiment que participer au ménage, à la bouffe, aux courses, à l’éducation et au soin des enfants, à la lessive,… va être vécu par une bonne partie des hommes comme une libération et non pas une perte du privilège de mettre les 2 pieds sous la table, de se barrer quand le repas est fini, et de sauter Mme quand ils en ont envie sans autre préoccupation ???
Tous les hommes ne sont pas ainsi, c’est une évidence, mais une bonne partie des hommes est ainsi, c’est un fait. Donc dire qu’ils vont vivre cela comme une libération est comique au dernier degré.
Pas tous c’est certain. Comme tu le dis pour beaucoup ils auront surtout à y perdre.
Mais là où je suis d’accord c’est que nous aurons aussi beaucoup à y gagner, individuellement et collectivement.
Déjà parce que je pense que beaucoup comme moi, aimeraient que la société reconnaisse davantage nos statuts de pères (les remarques au boulot quand tu pars à 16h pour aller chercher tes enfants à l’école, ça gonfle pas mal), nos droits à l’expression de nos sentiments non-genrés (papa qui n’a pas le droit de pleurer et maman qui n’a pas le droit d’être en colère), on serait aussi libérer des « obligations » liées à notre masculinité (tu bois pas t’es pas un homme et autres conneries du genre sont encore légions, pas toujours aussi explicites j’en conviens mais quand je vois comment je dois me battre au boulot pour qu’ils enlèvent l’alcool des « temps conviviaux » et qu’on me fait comprendre pour les élus hommes c’est important …) etc …
Collectivement on se rend compte que l’éducation genrée ça n’émancipe pas mais au moins quand les femmes prennent place dans la sphère publique, cela apporte des choses intéressantes en terme d’empathie, de compassion, de « care » …
Après ce n’est pas une solution miracle, le capitalisme sait récupérer les choses et j’ai vu des femmes (les fameuses femmes de pouvoir de Léa Salamé) se comporter comme les pires connards sur des postes de managers.
Y a énormément de choses qui seront positives … même pour nous à redonner un peu plus d’égalité et à émanciper les individus de conditionnements genrés.
Après là où je te rejoins c’est que les femmes auront bien plus à gagner que les hommes c’est certain. Mais en vrai, nous aussi on aurait à y gagner dans la majorité.
A l’époque le patronat était tellement moins arrogant et le bloc bourgeois ne se serait jamais permis certaines choses avec un PCF/CGT à 30% (voir plus au sortir de la guerre … et armé, ce qui n’est pas négligeable).
Ah oui et quand aujourd’hui des Pascal Praud parle d’extrême gauche en nous montrant LFI c’est à mourir de rire. LFI c’est moins à gauche que les gaullistes au sortir de la guerre qui étaient accompagnés de communistes armés pour leur faire comprendre que remettre de la justice sociale dans ce pays c’était vital.
Un PCF/CGT à 30% certains trouvent ça totalitaire, moi je vois surtout une façon de rendre un peu plus docile des Bernard Arnault, Bolloré, Stérin et leurs chiens de garde.
Mais bon si Mélenchon c’est l’extrême gauche, ça nous montre bien comment ils ont gagné le combat des idées.
C’est pour ça qu’on parle d’intersectionnalité. Parce qu’une femme blanche et riche peut être dominée dans son milieu par ses pairs hommes, elle pourra exercer sans complexe sa domination à l’égard des femmes et des hommes dans l’exercice de son activité professionnelle, en tant que représentante de la classe bourgeoise dominante.
Oui je suis d’accord et c’est là aussi où je mets toujours une limite à l’intersectionnalité pensée comme absolue par certains : il faut selon les situations garder quand même des priorités.
Ce que je veux dire par là c’est que Bettencourt ou Laurence Parisot sont, en tant que femmes, dominées sur bien des aspects par des hommes de leurs milieux. Mais leur situation sociale leur permet d’exercer une domination bien plus grande sur une très grande majorité d’hommes (et de femmes). Donc dans ce cas précis, la classe sociale me parait plus importante que la domination sexuelle.
A l’inverse dans un couple entre 2 prolos ou 2 bourgeois, les violences conjugales mettront davantage en exergue les oppressions que subissent les femmes que celles subies par les classes sociales dominées.
Mais bien souvent de toutes façons, même s’il convient de les hiérarchiser sur chaque situation pour comprendre ce que chaque individu subit, les facteurs d’exploitation sont multiples bien évidemment.
Alors ça, ça me paraît très discutable, à moins que la « sociologie du vote » ait beaucoup changé ces dernières années, le vote à l’extrême droite n’est pas, dans la plupart des cas, un vote de privilégiés.
Enfin ça dépend peut être de ce que tu entends par « position matérielle confortable », est-ce que par exemple tu ranges quelqu’un au SMIC (ou pas loin) dans cette catégorie ?
Et bien tu as de la chance de ne pas en connaître, et je t’envie.
J’en connais, à commencer par mon beau père.
Qui m’a par exemple demandé, lorsque j’étais en 2eme année de thèse, « quand est ce que j’allais arrêter mes bêtises d’étude pour faire des gamins à son fils », ou alors que je revenais d’une sortie VTT avec mon mari, que" s’il était mon père ou mon mari, il m’interdirait de faire cela car c’est trop dangereux pour une femme ".
Je suis bien contente de ne quasiment jamais le voir car il y a 700km entre nous.
Voilà, donc des gars comme ça, ça existe.
Et ceux là ne verront jamais l’égalité hommes femmes et le partage des tâches et l’abolition du patriarcat comme une libération. Vraiment jamais.
Je précise que sa femme, ma belle mère, il lui a fait un môme à 17 ans, lui a dit ensuite c’est au foyer maintenant. Et sa femme n’a même pas le droit de se doucher en son absence, parce qu’elle pourrait glisser et se faire mal. Non, ce n’est hélas pas une blague.
Je dis qu’un contrepoids face au bloc bourgeois permet de modérer l’arrogance et la rapacité de ce dernier.
Maintenant si ce contrepoids doit être un parti politique armé (qui n’a cependant pas fait usage de ses armes), je me pose sincèrement la question de savoir si ce serait vraiment pire que le niveau d’inégalités abyssal que l’on vit actuellement et qui dépasse même celui de la Belle-Epoque avant la première guerre mondiale.
Maintenant si un contrepoids autre existe, je prends. Mais depuis la fin de l’URSS et d’un parti/syndicat de classe (même si loin d’être parfait, je te concèderai bien des points à ce sujet), qu’est-ce qui a modéré l’oppression du Capital bourgeois ?
Raphaël Glucksmann, Sofia Aram, François Hollande ? Ou alors « l’extrême gauche » de LFI tellement sanguinaire et fanatique que depuis son existence les inégalités n’ont pas cessé d’augmenter ?
Je parlais de gens que je connais. Souvent classe moyenne, parents propriétaires d’un pavillon en campagne et proches de villes moyennes. Ils ne votent pas forcément mais les idées de l’ed ont infusées largement. Et clairement, ce que je dis va peut être faire scandale, mais dans certains cas être au SMIC est assez confortable, notamment quand on a un conjoint ou une conjointe qui gagne plus et qu’on vit dans un coin ou la vie n’est pas trop chère. Le niveau de revenu strict n’est pas capable de traduire complètement un vote.
C’est faux de l’affirmer comme tel, quand on regarde dans le sud-est de la France le profil du votant RN c’est petits commerçants et bourgeoisie économique blanche. Dans le Nord-Est de la France ce sont plutôt des gens au smic, blancs, dans des zones désindustrialisées et éloignés des services publics. Voir de nouveau le travail de Félicien Faury concernant le vote RN dans le Sud-Est qui n’a rien à voir avec l’image facile du : « Le vote Rn est un vote de prolo », c’est bien plus complexe.
Même dans le nord pas de Calais le vote RN est assez disparate. Dans les petits villages comme le mien ça vote extreme droite majoritairement (et de loin) et mon foyer est pas loin d’être le plus pauvre du village (et on est pas pauvre). Les plus pauvres que nous votent pas/peu (globalement les quelques locataires du village).
Travaux sociologiques qui ont montré que le ressort principal c’est la peur du déclassement, pas le déclassement. La peur de se retrouver en dernière position. D’où le pacte racial auquel ils adhèrent, qui n’améliorera pas substantiellement leur situation mais s’assurera que d’autres douilleront encore plus qu’eux.