Comme promis, un CR un peu plus complet sur Almost Innocent. En avant propos : nous sommes allés au bout de la campagne, mais on n’a pas commencé les 3-4 scénarios « épilogue » exclusifs au KS (on le fera évidemment plus tard). Je porte donc un jugement sur l’ensemble des scénarios et mécaniques qui seront présents dans la version retail. Je précise également qu’on a fait la campagne à deux, en difficulté moyenne, donc que l’essentiel de mon retour se base sur cette config’, même si on a fait également quelques parties à 3.
Simple et efficace 
Comme je l’ai déjà dit, le système de jeu est bien pensé, tout bête, mais suffisamment bien enrobé pour ne pas avoir l’impression de faire une grille de sudoku. En fait je n’ai pas grand chose de plus à dire dessus : il suffit de lire les (courtes) règles pour comprendre comment ça se joue et pour comprendre pourquoi c’est efficace. C’est très facile à expliquer et je pense qu’on peut même y faire jouer assez facilement des gens qui n’ont pas du tout l’habitude de jouer. Ils auront sans doute juste un peu de mal, lors de leur première partie, à comprendre qu’ils peuvent déduire plus de choses qu’ils n’imaginaient à partir des infos dont ils disposent.
Difficulté à la carte…
On peut jouer avec des novices sur un des premiers scénarios, en mode facile (et encore, le moyen est jouable) et je pense que ça roule sans soucis. Je rebondis sur la difficulté : les trois modes proposés sont bienvenus. On aura le droit à plus ou moins de jetons d’enquête (la base du jeu, ils permettent de poser les questions aux autres joueurs) selon le mode choisi et à plus ou moins de jetons « droit à l’erreur » en fin de partie. Mais le mode de difficulté autorise aussi plus ou moins de communication et d’échange d’infos : en facile, c’est plutôt open bar, en difficile on n’a le droit de rien dire et en moyen, on a seulement le droit de dire quand on a trouvé tous nos indices, ce qui est quand même une info précieuse pour les autres car ils savent ainsi qu’ils n’ont plus besoin de vous « aider » à trouver vos indices.
… mais très impactée par le hasard du tirage ?
Un doute toutefois sur la difficulté : comme j’ai dit, on a fait la campagne entière à deux en mode moyen et en dehors du scénario 4 qui nous a demandé trois essais, on a fait les 10 autres scénarios en un seul essai. Et je ne saurais dire si on a échoué au 4 parce qu’il était plus dur que les autres ou tout simplement parce que le tirage nous était défavorable. Car oui, je pense que la difficulté d’une partie, en tout cas à deux, va être étroitement lié au tirage des cartes indices. Dans certains cas, la disposition des indices sur la grille de jeu va permettre d’en faire deviner plusieurs très facilement et rapidement. Quand on aura fini les scénarios épilogue, je pense qu’on refera, avec madame, la campagne en mode difficile, pour voir si ça atténue ce potentiel souci. Je me demande aussi s’il n’est pas renforcé par la configuration deux joueurs, mais je n’ai pas fait assez de parties à plus de deux joueurs pour le dire…
Très bien à deux, mieux à plus ?
Cela dit, j’ai quand même fait quelques parties à 3 joueurs (hâte de tenter à 4, voire à 5). Et autant j’avais comme a priori que le jeu était exactement le même à deux qu’à davantage, autant ces quelques parties m’ont amené à douter. Je me disais que comme à deux, on donne des infos à un seul joueur et on reçoit des infos d’un seul (autre) joueur… et on fait nos déductions par rapport à ça. Sauf qu’en fait, dans la deuxième partie, j’ai eu une illumination. Voici le schéma d’un tour :
- joueur 1 (moi, en l’occurrence) donne une info à joueur 2
- joueur 2 donne une info à joueur 3
- joueur 3 donne une info à joueur 1
Dans ma tête, la phase « joueur 2 donne une info à joueur 3 » n’intéressait pas joueur 1. En fait, à au moins deux reprises, cette phase, non seulement l’intéressait, mais en plus, était fondamentale pour faire d’importantes déductions sur sa propre solution. Tout ça pour dire qu’à plus de deux, le jeu semble à première vue un peu plus difficile… si l’on ne tient pas compte des infos qui ne nous concernent a priori pas directement. En résumé, le jeu est peut-être (un poil) plus « riche » à plus de deux. Mais je pense que @BDPhilou pourrait nous confirmer (ou infirmer) ça.
Oshra, c’est chiant
Un mot sur la campagne, car comme je l’avais dit plus haut, c’est quelque chose que j’apprécie généralement. Je commence par le négatif : l’histoire n’apporte rien et n’est pas intéressante. Parce qu’elle est mal écrite ? Non, tout simplement parce que ce qu’elle raconte n’a pas vraiment de sens avec ce que l’on fait dans le jeu… Je ne sais pas trop comment le formuler, mais en gros on nous dit qu’on cherche à faire un truc (trouver des preuves pour trouver le coupable d’un fait, par exemple), mais en fait on va chercher une combinaison aléatoire d’éléments (victime, preuve, crime, etc.) alors même que notre personnage est en prison (par exemple). Bref, les textes d’intro des scénarios n’éclairent absolument pas ce qu’on fait pendant la partie, donc en fait… bah on s’en fout. Et je dis ça au sens où je les lisais à voix haute « pour la forme », mais clairement, en les lisant, je me disais « mais pourquoi je lis ça ??? » et ma nana… bah elle m’écoutait même pas. Ca veut tout dire. C’est pas bien grave, faut juste bien comprendre que cette campagne n’a absolument rien du tout de narratif au sens ludique (narration et gameplay ne s’imbriquent ni de près ni de loin). D’ailleurs, le dernier scénario (11-a ou 11-b) dépend d’un choix « narratif » qu’on doit faire à la fin du scénario 10 et on l’a tiré à pile ou face tellement on s’en foutait. J’étais moins sévère avec le narratif (pas ouf non plus) de Legacy of Yu, car on pouvait au moins véritablement parler d’une campagne.
Plein de (chouettes) variantes plutôt qu’une campagne
Du coup, la campagne, poubelle ? Ben non, pas du tout : en fait, un peu à la manière d’un Expédition à Newdale, cet enchaînement de scénarios vaguement habillés d’une histoire pas passionnante (décidemment, cet univers d’Oshra, en dehors du très chouette aspect graphique, n’a toujours rien d’intéressant à raconter) est surtout l’occasion de proposer autant de variantes plus ou moins différentes d’un même système de jeu. Et de ce point de vue là, c’est top. Vraiment. De la composition des grilles qui ajoutent des difficultés (indices qui prennent plusieurs cases, plus d’indices de chaque couleur, etc.) aux nouvelles mécaniques (pouvoirs de personnages, pion de reine qui se balade sur la grille aléatoirement pour que certaines colonnes/lignes coûtent plus cher en jetons d’enquête, etc.), c’est une réussite. Je veux dire, le système de jeu de base, avec 4-5 grilles différentes et les 3 modes de difficulté, auraient déjà proposé un jeu tout à fait rejouable et agréable. Donc là, vraiment, c’est agréable. Et je crois qu’il y a encore 1 ou 2 petites mécaniques supplémentaires dans l’épilogue KS exclusif.
Ces crayons qui tâchent 
Un dernier petit point noir (c’est le cas de le dire) sur le matériel : il est de bonne qualité, pas de soucis avec ça, mais, comme ça a déjà été signalé, les feutres noires laissent des petits « déchets » qui tâchent quand on essuie nos ardoises. Le problème, c’est qu’on a tendance à laisser nos cartes indices à proximité de nos ardoises (derrière nos paravents) et si on pense pas à les éloigner de l’ardoise quand on efface cette dernière, bah on tâche nos cartes. Coup de bol, il me restait des sleeves de la taille des cartes, ça règle le problème pour moi, mais faut vraiment être vigilant si vous êtes un peu maniaque avec votre matériel 
Bah c’est quand même vachement bien, tout ça
En résumé : c’est un excellent jeu de déduction. Si vous avez un jeu de déduction compétitif (un Planet X ou autre Cryptide) et que vous êtes amateur du genre, ça vaut le coup de tenter cette aventure coopérative. Cette fois on ne cherche pas qu’à optimiser les récoltes d’infos pour soi-même, mais il faut aussi songer au fait que les questions doivent être utiles aux autres. On gagne ou on perd ensemble. En plus de ça, « l’enrobage » est de qualité : le matos est chouette, les dessins aussi (si on aime le style). Le jeu est simple à comprendre et à expliquer, les parties sont courtes et le jeu est généreux avec toutes ses variantes (en fait je pense qu’il faut plus parler de variantes que de campagne, c’est beaucoup clair dans ce qui est proposé). Je crois que ce sera vendu un peu moins de 35 euros quand ça sortira en retail : à mon sens, ça les vaut, pour peu qu’on aime les jeux de déduction et qu’on n’en a pas déjà plein 