"L'école est une priorité", vraiment?

Ce soir je fulmine et j’enrage encore plus que d’habitude. J’ai donc décidé de me calmer les nerfs en lançant ce sujet de discussion.

Alors voilà, je suis prof remplaçante en école maternelle et élémentaire. Cela fait déjà plusieurs années que je constate un manque de professeur(e)s remplaçant(e)s pour l’école. C’était bien admis, dans ma circonscription en tous cas, que passé mi-mars ou mi-avril, il devenait compliqué de trouver un(e) remplaçant(e) pour des remplacements longs : de manière récurrente, chaque année, tous les remplaçant(s) étaient affectés, et il devenait impossible de trouver quelqu’un même en « empruntant » un(e) remplaçant(e) à une autre circonsription.
Ca, c’était la COVID.

J’ai commencé mon année scolaire sur un remplacement long, et dès la réunion de rentrée, c’était clair : vu les circonstances, on allait manquer de remplaçants. Ainsi un jeudi matin, à 8H15, alors que je faisais mes photocopies pour ma classe de CE2 habituelle, j’ai reçu un message m’informant que j’étais affectée pour la journée dans une autre classe en maternelle à 20 minutes de là. La directrice a dû prévenir les parents, qui se sont débrouillés tant bien que mal pour garder leurs enfants, pour éviter le brassage entre les élèves de classes différentes, sachant qu’ils avaient payé la cantine. J’apprends que dans l’école maternelle, il y a plusieurs enseignants en arrêt long pour diverses raisons (dont COVID), et que je suis là pour accueillir les élèves (et surtout faire en sorte que les parents ne râlent pas trop).
Une autre fois, de façon prévue cette fois-ci j’ai à nouveau du quitter « mes » élèves pour aller dans cette maternelle, la semaine suivante c’était mon collègue remplaçant lui aussi depuis 4 mois sur une classe de CM qui a dû les laisser pour aller dans cette même école.

Désormais j’effectue des remplacements d’une ou deux journées et je me rends compte qu’il y a beaucoup d’écoles qui subissent le manque de remplaçant(e)s : notamment deux classes de CM2 dont la maîtresse est absente depuis plusieurs mois et qui ont eu, au mieux, la même remplaçante pendant 1 semaine, sinon, chaque jour, quand il y en a une, c’est une maitresse différente ! Vive la continuité pédagogique ! Ces élèves n’ont eu que la moitié du CM1 voient leur année de CM2 malmenée par manque d’enseignants ! Pour certains on attend de voir si un(e) contractuel(le) serait recruté(e)… Solution loin d’être miracle car il s’agit bien souvent de personnes hors éducation nationale non formées qui ne connaissent même pas les programmes …

Ce qui m’amène à écrire ce message ce soir est d’avoir appris que dans une autre circonscription, il y avait 17 maîtresses non remplacées ! Et plusieurs remplaçants sont affectés à droite à gauche, 2 jours par-ci, 1 jour par là pour éteindre le mécontentent des parents … Le cas d’une classe m’a outrée : des élèves de moyens (3-4 ans) lors du 1er confinement , n’ont pas revu leur maitresse depuis le mois de mars 2020… Ils sont maintenant en grande section, et n’ont eu que des remplaçants intermittents… Parfois, ils sont confiés aux collègues des autres classes, qui se retrouvent avec des effectifs surchargés. Et maintenant un contractuel débarque dans une classe où les gamins dansent tout le temps, et il ne sait même pas par où commencer. Ces élèves seront en CP l’année prochaine et traineront pendant longtemps cette carence !
La maîtresse de mon fils, en CP, se fera hospitaliser dans une semaine, pendant un mois, et on ne sait toujours pas si elle sera remplacée non plus…

Bref, ça m’outre vraiment d’entendre notre cher ministre nous dire que l’école est une priorité, alors qu’on ne lui donne pas les moyens nécessaires ! L’Etat n’assure pas sa mission d’éducation nationale, et je m’étonne que l’on n’en parle pas davantage dans les médias.

Je sais suis fonctionnaire, j’ai un devoir de réserve, tout ça tout ça, mais la situation m’use tellement !

Avez-vous, vous aussi, constaté des non-remplacements fréquents, des situations similaires à celles que je décris ?
Merci d’éviter les remarques du genre « ah, ces profs, toujours absents ! » Les personnes que j’ai remplacées étaient soit gravement malades, soit enceintes presque à terme… bref, pas d’arrêts de complaisance.

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Clairement, en étant suppléant, je le vis bien ce système, et encore, depuis quelques temps ma situation est assez stable. Mais en effet, au début, j’allais 1 semaine là, 2 par là, puis 1 mois dans telle école etc… La première année de suppléance c’est souvent ça, après tu te vois affecté de manière plus régulière et plus longue sur certains postes, une fois que t’as fait tes preuves ^^ et là depuis 4 ans disons que ça va. Mais même au collège où je taf depuis 5 ans, il n’est pas rare d’avoir une enseignante absente pour plusieurs semaines, sans remplacement aucun, et que l’ensemble du personnel se partage ses heures de manière bénévole. Je l’ai d’ailleurs fait l’an dernier plusieurs heures par semaines étant donné que c’était également ma matière.
Mais oui, le gouvernement se fout de nous, ça manque de moyen et de remplaçant. Mais quand on voit les concours, la façon dont ils sont dirigés, le fait que jamais, absolument jamais le nombre de poste à pourvoir n’est rempli… ça laisse songeur !

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La profession d’enseignant, en plus d’être mal payée, est de plus en plus mal considérée (des parents qui s’attendent à ce que l’école fasse tout, qui laissent tout faire à leurs enfants, qui engueulent les enseignants lorsque leur progéniture est punie, …) :slight_smile:
Bon courage à vous

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J’ai le cas d’une maîtresse qui n’aime vraiment pas les enfants (comportement et vocabulaire déplacée . Plusieurs plaintes de parents ont été émis mais rien ne bouge) très souvent absente et donc les élèves de cm1 qui l’ont, voient plus les remplaçant(e)s qui s’enchaînent que cette maîtresse.

Moi je suis CPE et je confirme: la peste c’est le rectorat et le choléra c’est les parents, les enfants en réalité ne sont ni meilleurs ni pire qu’avant, ce sont juste des enfants/ ados qui font les mêmes conneries que nous à leurs ages. Oui il y a eu une dégradation de la société de manière général en ce qui concerne l’éducation pas étonnant que nous dégringolons dans les classements mondiaux !

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Déjà, je voudrais vous féliciter et vous souhaitez un bon courage pour la suite !

Pour ma part, à Lyon, ma fille de 3 ans a une remplaçante en ce moment mais cela était prévu depuis un moment car sa maitresse a du subir une opération lourde et sera absente pendant 1 mois. Donc il n’y a pas eu de soucis pour ce coup. Par contre en effet, en début d’année il y a eu plusieurs jours d’absence ici et là et aucun remplacement, voulant éviter le brassage, j’ai gardé ma fille à la maison (vive le télé-travail) mais j’ai vu pleins de parents râler et dire « comment on va faire nous!? » et leurs enfants qui sont mis dans d’autres classes (surcharge des classes) et ça c’est vraiment pas les aider… ni les profs mais surtout les élèves !

Et avec les retours que ma conjointe (qui est AESH) me fait sur comment cela se passe dans son lycée, avec les élèves, les profs… l’éducation c’est bien compliqué ! et le problème ne vient pas (que) des enfants… quand on voit plus loin, les problèmes dans leurs familles, leurs problèmes dans les relations, les problèmes des profs et ajouté à ça maintenant la crise sanitaire (et économique on peut le dire maintenant !) c’est vraiment compliqué, donc je vous souhaite bon courage !

ça me rend fou de voir tout ces problèmes dans l’éducation… et ça me fait de la peine pour ces enfants, je pense de plus en plus à trouver une solution, trouver un moyen d’aider, de rentrer là dedans, aller taper dans la fourmilière, mais une reconversion semble compliqué et cela ne doit pas aider à renforcer les rangs de l’éducation national qui est justement en déperdition.

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Moins l’on éduque, plus le peuple est manipulable facilement.

Je pourrais en écrire des tartines, mais cette petite phrase résume ma pensée.

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Le rôle de notre ministre n’est pas de dire la vérité, mais de faire gagner des voix (et au passage il se pousse du col).

Mais pour ne pas accabler que lui, c’est en effet une série de choix anciens, de tous bords politiques, une centralisation mortifère de mon point de vue, et plus globalement un choix de société - conscient ou non - qui fondent ce qu’est l’école aujourd’hui.

Elle tient, quand elle tient, grâce à la bonne volonté des élèves, des profs, des éducateurs, y compris les parents bien sûr, quand le dialogue est là.

On ne fait pas une « éducation nationale » seulement avec de la bonne volonté.

Mais nous n’avons manifestement pas tous les mêmes « priorités ».

(Au passage, cwowd et ses douces folies, c’est pas mal pour penser à autre chose, parole de prof !)

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Beaucoup de professeurs non-remplacés dans le groupe scolaire de ma fille également. Les parents que je connais gardent leurs enfants et font de leur mieux pour éviter le brassage.
Le gouvernement n’est absolument pas prêt à accroître les effectifs (ni à revaloriser les salaires d’ailleurs). De même qu’il refuse d’augmenter les moyens de l’hôpital public et ponctionne l’assurance chômage et les APL. Heureusement en 2020, en pleine crise, la fortune des milliardaires Français s’est accrue de 175 milliards. Je pense qu’il n’y a pas vraiment besoin d’aller chercher trop loin pour deviner quelle est la « priorité » de ce gouvernement.

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Et à côté de ca, ma femme, prof des écoles, est toujours en disponibilité contrainte depuis 2 ans (sans travail et sans un rond), car son académie ne veut pas la laisser partir, alors que notre projet de vie était de quitter Paris.

C’est cool d’être fonctionnaire, mais à côté de ca, tu n’as le droit à rien. Et le pire, c’est que l’académie où l’on vit, est en manque de profs, mais qu’elle a interdiction de se faire recruter en tant que contractuelle…

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L’educ nat et la santé se font méthodiquement défoncées depuis au moins 20 ans par les gouvernements successifs bien aidé par les médias des Bollore et cie.

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Oh put… Un topic sur le net sans prof Bashing…:smiley:

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Et pourtant on est le pays le plus taxé au monde. On fait même fuir les entreprises à l’étranger tellement on taxe (j’en sais quelque chose, je baigne dedans tous les jours). Donc de l’argent il y en a, il est juste très très mal utilisé depuis des dizaines d’années. C’est le dénominateur commun à de nombreux problèmes. Et c’est pas que de la faute à Macron je pense.

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Pour apporter ma petite expérience (enfin surtout celle de mon fils :wink:), en classe de CM1, il a eu au moins 11 enseignants sur l’année. Seul la moitié du programme de CM1 à pu être vu.

Pour dédouaner aussi un peu l’Education Nationale, il y a avait dans sa classe un élève très en difficulté. Avec des problèmes de comportement incroyables. (Je l’ai côtoyé 3 heures sur une sortie scolaire. J’ai eu pitié pour la remplaçante qui arrivait le jour même. Et eu envie de l’étranger apres 20 minutes).
Résultat aucune AVS ne lui avait été accordée et les parents semblaient dans le déni des problèmes de leur fils. Le jeu de la classe était de le pousser à exploser, d’en rire et de s’amuser de voir le ou la remplaçante galérer pour le gérer après.

Bon c’était il y a 5 ans. Et bien sûr aucune réelle communication de la direction de l’école primaire en direction des parents, pas plus que du rectorat.

Heureusement, la situation n’est pas aussi dégradée partout et tous les ans. Et la covid-19 doit mettre un sacré coup d’amplificateur au phénomène.

J’oubliais, et c’est pourtant le plus important : bon courage à vous et merci pour votre investissement.

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Eh bien, moi qui suis en cours de reconversion pour devenir prof, vous me vendez du rêve !
(Mais ranafout, j’ai envie d’enseigner, ça ne m’arrêtera pas !)

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Vas-y : c’est un métier extra. Parole de reconverti. Depuis 12 ans.

Que l’institution soit en souffrance, c’est autre chose, même si ça pèse par moments.

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Je vois ce que ça donne au collège grâce à ma compagne, et honnêtement tous les discours de Blanquer sur l’école et son importance, c’est du vent. Ce qui fait vivre l’école, c’est l’investissement de ses acteurs locaux et du terrain (profs, CPE, principaux) mais pas le rectorat et l’administration. Franchement entre les manques de moyens flagrants et le déni des parents sur les capacités réelles de leurs « merveilles » dont ils ne s’occupent jamais (et c’est toujours la faute des enseignants), c’est pas étonnant que cette institution se retrouve face à un mur de plus en plus grand.
Je crois fondamentalement à l’ascenseur social et à l’école républicaine, ça m’a permis à ma sœur, mon frère et moi de passer de famille peu / pas qualifier à Bac +8, juste grâce à l’école et sans tous les cours particuliers ou autre car trop chers (là où les familles de CSP+ se gênent pas pour combler l’éventuel manquement pédagogique). Pourtant c’est aussi parce que mes parents étaient derrière et ont poussé pour qu’on bosse à l’école. Si les parents ne s’investissent pas, les profs peuvent donner toute leur énergie mais n’arriveront à tirer vers le haut qu’une poignée infime d’élèves.

Donc il y a à mon sens deux grands leviers pour rectifier l’école : assurer que celle-ci fonctionne correctement (meme pas bien, juste correctement, car on en est loin dans certains cas), avec une vraie valorisation du métier de prof, et un nombre plus important pour avoir des classes moins chargées et pouvoir mieux enseigner aux élèves ; avoir une vraie position de fermeté vis à vis des familles et des parents d’élèves, ne pas avoir à se coucher ou se faire engueuler parce que l’enfant roi a eu une punition, mettre une vraie pression pour que la famille suive et participe à l’éducation de leurs enfants (c’est leur responsabilité en tant que parents), même si je sais que faire des mesures dans ce sens, ça paraît quand même compliqué sur le papier.

A l’université on a moins ce problème, car la sélection a déjà plus ou moins était faite à l’entrée, les profs peuvent faire leurs enseignements même à distance, c’est plus de l’acquisition de savoir et de compétences et pas d’éducation à proprement parler. Mais en terme de moyen, on voit le niveau des Masters qui sortent qui diminue toujours un peu plus, avec de moins en moins de TP, le manque d’enseignant chercheur (mais faudrait surtout pas ouvrir des postes en CDI), etc. C’est pas aussi marqué que le primaire et secondaire, mais c’est pas la fête non plus.

Vu le nombre d’enseignants cwowdiens, y a moins de risque. :ok_hand:

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:scream: Quelle aberration !
Il me semble qu’une collègue de primaire, pour pouvoir enseigner dans le département qu’elle souhaitait pour suivre son conjoint, avait décidé de démissionner, et ainsi perdre ses échelons, etc. pour repasser le concours d’entrée dans le bon département, et tout recommencer à zéro…

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Moi je suis de l’autre côté, je suis le parent-chiant-qu’est-aussi-délégué-et-qui-n’aime-pas-les-punitions, et je suis d’accord sur le fait que l’EN en tant qu’entité et le personnel de l’EN sur le terrain ce sont deux mondes qui au mieux sont différents, au pire s’opposent.
Pis vous oubliez de mentionner la petite couche supplémentaire : les municipalités qui gèrent les ATSEM et le périscolaire :smiley:

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